Le Journal de Montréal

LES DROITS DES ANIMAUX

JACQUES LANCTÔT Collaboration spéciale

Le spécisme serait « comme le racisme et le sexisme, une idéologie qui tend à justifier une discrimination ». Ou encore « un préjugé ou une attitude de parti pris en faveur des intérêts des membres de sa propre espèce et à l’encontre des intérêts des membres des autres espèces », selon la définition du professeur Peter Singer dans son livre La libération animale. Pour Singer, notre mode de vie serait construit sur l’exploitation des animaux et il propose de le remplacer par le véganisme et d’abolir nos pratiques discriminatoires envers les animaux.

Dans son essai Les animaux et nous, l’auteur François-Yves Doré adopte un point de vue plus modéré. Il s’oppose à mettre sur un même pied d’égalité le spécisme, qui serait une forme de discrimination, et le racisme envers les humains.

« La façon dont les animaux ont été traités, et le sont encore parfois, n’a pas de commune mesure avec la violence psychologique, l’humiliation et la souffrance que le racisme cause aux populations humaines. »

Notre perception des animaux a beaucoup évolué à travers le temps, dit-il. Si, il y a des siècles, un fossé infranchissable séparait les animaux des humains, les seuls dotés de la raison, du langage et d’une conscience, avec Charles Darwin, nos croyances commencent à changer.

Toute vie serait le fruit d’une lente évolution.

« Les humains et autres animaux auraient donc des fondements communs. »

Petit à petit, notre perception des animaux a commencé à changer et aujourd’hui de moins en moins de gens croient que « la seule appartenance à l’espèce humaine est suffisante pour justifier n’importe quel traitement infligé aux autres animaux ».

Par exemple, l’expérimentation en laboratoire est désormais encadrée et doit respecter la règle des « 3R » : Remplacement, Réduction et Raffinement.

Mais pour les antispécistes, aucun animal ne devrait être tué, ni même domestiqué. Même la récolte du miel doit être interdite.

Cela frise le dogmatisme, dit Doré, et ressemble à la doctrine qui, il n’y a pas si longtemps, dominait au Québec : « Hors de l’Église, point de salut ! »

INTERSPÉCISME

Ces militants radicaux placent les humains et les animaux sur un même pied d’égalité.

Tous deux auraient une conscience de soi, ce sont des êtres sensibles, capables d’éprouver aussi bien la souffrance que le plaisir. Il serait donc immoral de tuer un maringouin qui vient de vous piquer.

La science n’a pas encore pu répondre à la question de la conscience chez les animaux, quoi qu’en disent les antispécistes.

« Les animaux ont-ils vraiment une conscience de soi qui leur conférerait le statut de personne non humaine ? » se demande le chercheur, pour conclure que « l’incommunicabilité de leurs désirs, de leurs craintes et de leurs doutes, pour peu qu’ils existent, reste totale ».

On aurait donc tort d’accorder autant de droits aux animaux qu’aux humains. Ainsi en est-il de la « souveraineté » des animaux sauvages, dont il faudrait respecter le territoire.

« Pour des citoyens de la Catalogne, de l’Écosse ou du Québec qui débattent depuis des décennies de la souveraineté de leur nation et de leur territoire, il est pour le moins étrange de lire que les animaux sauvages, eux, y auraient automatiquement droit », s’étonne l’auteur.

Finalement, conclut-il, il y aurait une interdépendance entre les animaux et nous – chacun a besoin de l’autre pour vivre –, et nous devrions nous inspirer du respect qui anime nos frères amérindiens envers les animaux.

C’est ce que l’auteur appelle l’interspécisme.

LIVRES

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2023-01-21T08:00:00.0000000Z

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https://jdm.pressreader.com/article/283412015818008

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