Le Journal de Montréal

LE POUVOIR nostalgie INFINI DE LA

CÉDRIC BÉLANGER Le Journal de Québec cedric.belanger @quebecormedia.com

S’il y a une industrie qui n’a pas été affectée par la pandémie, c’est celle de la nostalgie. Les vedettes internationales qui ont connu leur heure de gloire au XXe siècle continuent de remplir les amphithéâtres en vendant les places à prix d’or et elles ne sont pas les seules à profiter de la manne. Plusieurs artistes québécois font aussi de très bonnes affaires en faisant revivre de vieux succès.

Il y a quelques années, le producteur Nicolas Lemieux a eu une idée audacieuse : réenregistrer les chansons d’Harmonium avec un orchestre symphonique.

Le succès a été retentissant. Lancé en décembre 2021 et tenu à l’écart des plateformes d’écoute en continu, l’album Harmonium symphonique : histoires sans paroles aété vendu à 160 000 exemplaires et le spectacle qui en a été tiré approche le billet d’or (50 000 billets).

La réaction des Québécois a « terriblement ému » Serge Fiori.

« Je n’en reviens pas que ce soit le même amour qu’à l’époque d’Harmonium. En quelque part, il y en a même plus parce qu’on touche une autre génération. C’est le plus grand cadeau, que ça dure depuis 50 ans. »

DES CENTAINES DE REPRÉSENTATIONS

Ce regain d’intérêt pour la musique d’Harmonium est loin d’être un cas isolé. Au dernier Gala de l’ADISQ, le trio formé de Joe Bocan, Marie Carmen et MarieDenise Pelletier a remporté un Félix pour son spectacle Pour une histoire d’un soir, dans lequel ces trois grandes voix féminines reprennent depuis trois ans leurs vieux succès des années 1980 et 1990.

Au cours de la dernière décennie, leur producteur Martin Leclerc a aussi été derrière les succès de plusieurs tournées, dont Les années bonheur ,qui mettait en vedette les regrettés Michel Louvain et Renée Martel, et Entre vous et nous, avec Martine St-Clair, Marie Michèle Desrosiers, Luce Dufault et Marie-Élaine Thibert.

Il est bien placé pour constater que la nostalgie, c’est payant.

« Ça fait vivre bien du monde. Ça fait vivre des équipes techniques, des musiciens, des artistes, du personnel de bureau. De notre côté, on fait entre 400 et 500 représentations par année sur l’ensemble des tournées. C’est considérable. Il y a des fins de semaine où on a une dizaine de représentations. Ça fait rouler une industrie. »

DES REPRISES PAYANTES

Actif dans ce créneau depuis 2007 avec ses projets 70s, 80s et 90s dans lesquels il chante des succès rock du siècle dernier, Sylvain Cossette est devenu la référence au Québec dans les spectacles de reprises.

« 70s, c’est un succès fou. On a vendu 250 000 albums et j’ai fait 600 shows », rappelle celui qui continue de remplir des salles avec son spectacle Sylvain Cossette Live.

Christian Marc Gendron suit ses traces, lui aussi en chantant des classiques du répertoire pop-rock. Après avoir fait sa marque avec son spectacle Piano Man Experience pendant cinq ans, il accumule maintenant les représentations de Piano Man 2.

À titre d’ancien musicien de Sylvain Cossette, il a vite compris le pouvoir de la nostalgie sur les foules. « Je faisais cinq shows par semaine avec Sylvain. Je me suis acheté une maison grâce à ça. »

TOUT A DÉBUTÉ AVEC LES BEATLES

La nostalgie n’est pas seulement l’apanage de l’industrie musicale. Cet été, la suite de Top Gun a fait banco dans les cinémas. L’adaptation théâtrale du téléroman des années 1970 Symphorien a connu un vif succès et, à la télé, on ne compte plus le nombre de fois qu’on a pu revoir les épisodes de La petite vie.

Il reste que l’attrait de la nostalgie est particulièrement élevé dans le réseau des tournées internationales.

En 2021, selon des données publiées par le site Pollstar (voir tableau à droite), c’est la courte tournée des Rolling Stones qui a été la plus lucrative. Plus de 516 000 personnes ont payé en moyenne 223 $ le billet pour (ré)entendre (I Can’t Get No) Satisfaction, soit 6 $ de moins que pour se refaire servir Hotel California par les Eagles.

D’une année à l’autre, les noms de Paul McCartney, Elton John, U2, Kiss et Bon Jovi figurent aussi dans les listes des tournées les plus payantes.

Selon Damien Hallegatte, professeur de marketing à l’Université du Québec à Chicoutimi, ce mouvement nostalgique a débuté dans les années 1990 avec la publication de la première anthologie des Beatles, suivie peu après du retour sur scène des Rolling Stones.

« On s’est rendu compte que les groupes tombés dans l’oubli ou qui n’avaient pas le lustre d’antan, on pouvait les faire revenir et ils pouvaient dépasser de très loin les groupes de l’heure. Quand on regarde le top 10 des tournées les plus lucratives, il y a toujours 7-8 vieux groupes des années 1970 et juste 1-2 des années 2000. »

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2022-11-26T08:00:00.0000000Z

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