Le Journal de Montréal

LE CONTRAIRE D’UN « GÉNOCIDE EN DOUCE »

JACQUES LANCTÔT Collaboration spéciale

Motivés par le désir effréné de richesses, l’Espagne et le Portugal se sont enrichis en pillant le continent américain qu’ils venaient de « découvrir », massacrant au passage tous ceux qui leur résistaient. Une nouvelle « civilisation » était en train de naître, avec l’épée et la croix, qui allait éliminer de 90 à 95 % des peuples autochtones. Cet ouvrage captivant raconte l’histoire de ce massacre.

Christophe Colomb, ce grand « découvreur » de l’Amérique, n’était, en fait, qu’un marin perdu qui se croyait en Inde, comme le disait l’anthropologue Serge Bouchard. Il fut aussi un gouverneur intraitable à qui ne répugnait pas l’utilisation de la violence pour parvenir à ses fins. Les Indiens Taïnos de l’île de Quisqueya/Hispaniola furent ses premières victimes. S’opposant au travail forcé dans les mines d’or que le conquérant espagnol leur imposait, ils furent massacrés sans pitié.

Les soldats, racontent les auteurs,

« à pied et à cheval, portant des lances et des épées et accompagnés de chiens de chasse, entrèrent dans les villes, les bourgs et les villages, n’épargnant ni la vie des enfants, ni celle des aînés, ni celle des femmes enceintes ou encore qui venaient d’accoucher. Ouvrant leur ventre, ils les découpaient en morceaux. Ils tuaient les Indiens, les brûlaient et les lançaient aux chiens pour qu’ils soient dévorés ». La cruauté des Espagnols fut sans borne.

DE LA RUSE ET LA SUPERCHERIE

Les travaux forcés, la faim et les maladies finirent par décimer les indigènes. « À la fin du XVIe siècle, les Taïnos Arawaks avaient pratiquement été anéantis sur les îles principales (Cuba, Porto Rico, Jamaïque et Hispaniola) et aussi sur les îles mineures ; seules quelques Caraïbes survécurent sur la petite île de La Dominique. » Si bien qu’on commença à importer des esclaves d’Afrique pour les remplacer.

Le Mexique, où prédominaient des civilisations fort avancées, comme celles des Aztèques et des Mayas, connut le même sort.

« Au cours des 30 ans qui suivirent (15191548), la population indigène de la région diminua de 20 millions de personnes, c’est-à-dire environ un demi-million par année. […] De 1519 à l’année 1600, moins de 3 % de la population d’origine survécut. Et cinq royaumes disparurent. […] » Cinq siècles après la conquête et deux siècles après l’indépendance du Mexique, les populations indigènes continuent à chercher leur place au soleil, affirment les auteurs.

Puis ce fut au tour de l’Empire inca (Pérou, Équateur et Bolivie) de recevoir la visite non désirée des Espagnols. En 1532, Francisco Pizarro arriva au Pérou en provenance du Panama. Utilisant la ruse et la supercherie, il réussit à faire prisonnier le chef inca Atahualpa, non sans avoir massacré les cinq mille soldats sans armes qui l’accompagnaient.

Après avoir exécuté Atahualpa et s’être emparé de tout l’or et l’argent trouvés sur place, Pizarro marcha sur Cuzco, la capitale de l’Empire, qu’il pilla à fond. La ville de Potosí, en Bolivie, devint l’épicentre de l’extraction minière, surtout d’argent. L’équivalent de cinq milliards de dollars fut ainsi envoyé en Espagne, tandis que plus de huit millions d’Indiens périrent dans les mines pendant la période coloniale.

CONQUÊTE DU PORTUGAL

Pour ne pas être en reste, le Portugal se lança à son tour à la conquête du Nouveau Monde. On débarqua au Brésil en avril de l’an 1500. Quatre à cinq millions d’habitants et des centaines de peuples différents y vivaient.

N’y trouvant aucun métal précieux, les colonisateurs s’intéressèrent au bois du Brésil, qui renfermait un précieux colorant, utile pour l’industrie textile, puis à la canne à sucre. Ils s’emparèrent des terres, sans égard aux populations indigènes qui y vivaient. Commença alors un autre génocide, celui des peuples guaranis.

Puis l’Empire britannique s’installa plus au nord où vivaient environ 18 millions d’Autochtones. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 2,5 millions. Le génocide dura trois siècles. Les mêmes méthodes barbares furent appliquées pour implanter la colonie. Quant à la France, qui dominait déjà le nord du continent (le Canada) et s’étendait jusqu’au fleuve Mississippi, elle fut vaincue par l’Angleterre au terme de la guerre de Sept Ans et lui céda toutes ses possessions.

Pour ceux qui doutaient encore du génocide des Premières Nations entrepris avec l’arrivée des Européens en terre d’Amérique, cet ouvrage facile d’accès saura très certainement vous convaincre.

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2022-11-26T08:00:00.0000000Z

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