Le Journal de Montréal

Voici comment l’inondation du réservoir Gouin a englouti deux fois un village attikamek

Lorsque la Shawinigan Water and Power a harnaché la rivière SaintMaurice pour en faire le réservoir Gouin en 1918, les habitants d’Opitciwan ont été relogés sur un site… qui a été noyé encore.

MATHIEU-ROBERT SAUVÉ

« La première inondation a laissé des traces profondes dans la mémoire collective. Des ossements de sépultures déterrées par l’eau partaient à la dérive. Les aînés ont longtemps parlé de cet événement en pleurant », rappelle David Boivin, conseiller politique au Conseil de la Nation Atikamekw.Un autre village de cette Première Nation allait payer le prix de l’industrialisation, puisque les habitants de Coucoucache se trouvaient dans le bassin de la rivière Saint-Maurice au moment de construire le barrage de Rapide-Blanc, en 1930. Le village est aujourd’hui disparu.

MAUVAIS SOUVENIRS

Par compensation pour les déplacements forcés, la compagnie électrique a versé une somme de 380 $.

Pour les Attikameks qui étaient passés d’un mode de vie nomade à la sédentarisation en quelques décennies à peine, ce choc de la civilisation n’avait rien de positif.

« Avant l’instauration de la Loi sur les Indiens en 1885, transformant une partie de notre territoire en une réserve, Wemotaci était un lieu de rassemblement », explique M. Boivin, qui a été chef de cette communauté de 2011 à 2015.

Le village, qui compte aujourd’hui 2000 personnes, forme environ le quart du peuple attikamek. Opitciwan et Manawan, avec environ 3000 habitants, forment les deux autres villages. Plus de 60 % de la population a moins de 35 ans.

UNE LANGUE VIVANTE

On assiste actuellement à un renouveau de la culture attikamek, soutient Lisette Petiquay, conseillère à la culture et à l’éducation au Conseil de la Nation.

« La langue est parlée par 95 % de la population. Nous l’enseignons dès la maternelle et jusqu’à l’école secondaire », explique cette ancienne enseignante de 59 ans. Lorsqu’elle était enfant, à Opitciwan, c’était le français qui était la langue scolaire. Même si cette langue demeure fragile, elle est très valorisée dans les familles, soutient-elle.

Un dictionnaire français-attikamek a été lancé l’an dernier. Fruit du travail des aînés en collaboration avec des linguistes, ce dictionnaire est à la disposition des enseignants. Il sera « d’une grande utilité pour la conservation de notre langue », disait au lancement Nicole Petiquay, coordonnatrice linguistique du projet.

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2023-03-18T07:00:00.0000000Z

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