Le Journal de Montréal

GUERRE IMPLACABLE, ENQUÊTE ENLEVANTE

ROMANS D’ICI La guerre des motards des années 1990 était en soi un roman noir. Jacques Côté y ajoute juste assez d’éléments pour en faire une histoire trépidante !

JOSÉE BOILEAU Collaboration spéciale

L’avertissement au début de l’ouvrage est clair : Requiem américain n’est pas une juxtaposition exacte de la guerre qui a sévi entre les Hells Angels et les Rock Machines il y a trente ans. Il s’agit plutôt d’une « interprétation très libre » des événements.

Il reste qu’on y trouve un chef des motards charismatique qui, aussitôt libéré, se rend à un gala de boxe où il se fait applaudir ; une procureure de la Couronne combative ; un ripou qui livre aux criminels des informations cruciales ; un journaliste grièvement blessé par balles ; des politiciens associés à la mafia…

Toute l’actualité de ces années-là nous revient donc immédiatement en tête !

Mais Jacques Côté, dont les talents d’auteur de romans policiers ont été maintes fois récompensés, sait tirer d’autres ficelles pour nous attacher à son récit. D’abord, Owen Hayden, son lieutenant responsable de l’escouade antigang, est le frère de Tom, bras droit du chef des Hells.

La cassure entre les deux frères fait ressortir les deux facettes du terrain qu’occupent policiers et bandits, de même que le poids des influences familiales… et des inquiétudes qui en découlent ! La scène des funérailles du père Hayden, qui oblige les deux fils à être présents sur les lieux en faisant comme si l’autre n’y était pas, est à cet égard riche de charge émotive.

NOMBREUX MOMENTS FORTS

Côté concocte bien d’autres moments forts : interrogatoires, attentats, confrontations au restaurant et enlèvement spectaculaire nous tiennent en haleine. Mais il y ajoute le quotidien des enquêteurs : leur travail de fourmi pour contrer la guerre en développement ; leurs craintes aussi d’avoir une taupe dans leurs rangs – même couler les conventions collectives des policiers peut être utile aux criminels. On partage leur stress.

Vu le grand nombre de personnages mis en scène, il faut un peu de temps pour circuler avec aisance dans les pages de Requiem américain. Mais le roman compte plus de 300 pages, alors on finit par se familiariser avec le jeu d’alliances criminelles qui se font et se défont.

Le suivi du récit est par ailleurs facilité du fait qu’il se déroule en ordre chronologique. L’histoire est détaillée jour après jour sur un peu plus d’un mois, du 18 octobre au 25 novembre 1996. Les références aux événements de l’époque – notamment la tenue du référendum sur la souveraineté du Québec un an plus tôt – sont prises en compte.

En ajoutant la vivacité des dialogues, tout cela renforce l’impression de réalisme de Requiem américain. Certes, ce n’est pas un documentaire ni un essai comme l’auteur en a déjà signé – notamment Wilfrid Derome, expert en homicides sur les débuts de la médecine légale en Amérique. On a néanmoins l’impression d’être aux côtés d’Owen Hayden.

Et comme celui-ci, on est effrayé de la conclusion du récit ! Mais il y aura une suite, qu’on lira à coup sûr.

WEEKEND | LIVRES

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2023-03-18T07:00:00.0000000Z

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